Internet citoyen

E-administration

L'Internet Citoyen "englobe les usages, services, pratiques et comportements liés aux outils numériques en réseaux et dédiés à des actions publiques et solidaires, locales, nationales ou internationales, non marchandes, portées par la société civile.". Wikipédia (https://fr.wikipedia.org/wiki/Internet_citoyen)

Les administrations en ligne, les services de l'emploi ou de la formation, les services de démocratie locale, etc sont autant de mise en oeuvre de l'Internet Citoyen.

C'est un espace d'enjeux pour les démocraties car avec le développement d'Internet et de son caractère commercial, l'Internet Citoyen est un garant de la mise en oeuvre d'outils et de services non-marchands à finalité d'intérêt public ou de service public, pour développer : "une société de l'information qui respecte les identités et la pluralité, qui évite de créer ou renforcer des élitismes, et qui veille à la non-marchandisation des outils qu'ils considèrent indispensables aux services publics.". Wikipédia (https://fr.wikipedia.org/wiki/Internet_citoyen)

Une définition du "service public numérique", qui nous est proposée par la Cour des Comptes Française, est d'englober des télé-services et des téléprocédures : [1]
  • les télé-services, qui permettent à l’usager d’accéder en ligne à des informations et services mis à sa disposition par l’administration ; 
  • les téléprocédures au sens strict qui permettent à l’usager d’accomplir une démarche obligatoire ou facultative, ou encore de remplir une procédure administrative par l'intermédiaire d'un service en ligne sur internet (télé-déclaration, par exemple).
L'Internet Citoyen est composé pour une part de la dématérialisation des services publics, c'est-à-dire permettre aux citoyens de faire leur démarche via Internet plutôt que de devoir se déplacer jusqu'à l'administration. La France compte dématéraliser ses services publics d'ici à 2022, mais : "l’ambitieux programme du gouvernement quant à la transformation de l’administration inquiète car il s’impose très rapidement à l’insu des agents et des publics." [2].

Les craintes concernants l'administration en ligne sont le non-recours aux droits et aux services administratifs, car : "Certains perçoivent la dématérialisation comme un « facilitateur » de l’accès aux droits et aux services, pour d’autres, au contraire, elle est « génératrice » ou « activatrice » de difficultés." [2].

Ainsi : "Les relations administratives dématérialisées peuvent situer les personnes d’un côté ou de l’autre des frontières de l’intégration et de l’exclusion. Ainsi, des publics entiers pourraient sortir définitivement des dispositifs sociaux avec des effets imprévisibles certainement très lourds." [2].


Vitalis André, Duhaut Nicolas, « NTIC et relation administrative : de la relation de guichet à la relation de réseau », Revue française d'administration publique, 2004/2 (no110), p. 315-326. DOI : 10.3917/rfap.110.0315. URL : https://www.cairn.info/revue-francaise-d-administration-publique-2004-2-page-315.htm

A ces inquiétudes s'ajoutent les craintes liées à l'illectronisme qui touche encore 1 personne sur 5 en France, et comme le souligne le rapport de la Cour des Comptes Française : "La capacité à utiliser les technologies de l’information et de la communication (TIC) figure désormais parmi les compétences de base, à côté des compétences lire/écrire et calculer/compter (...)" [1], et en ce qui concene l'utilisation des services en ligne : "des inégalités persistent du fait de l’existence d’un illettrisme électronique, fortement lié à l’illettrisme sans que les deux situations se recoupent totalement." [1].

En ce qui concerne l'accès à Internet, l'Union Européenne encourage, au travers de sont initiative WiFi4EU : "l’installation de points d’accès wifi publics gratuits dans les collectivités locales à travers l’Union européenne: sur les places, dans les parcs, hôpitaux et autres lieux publics." [3].

L'Union Européenne prône donc un accès pour tous en Europe : "où tout un chacun a accès à des réseaux numériques de grande qualité." [3].


Algorithmes publics

Les services publics numériques, qui permettent de faire valoir des droits ou d'effectuer des procédures en ligne, utilisent des algorithmes pour effectuer ces tâches informatisées.

Les algorithmes mis en oeuvre ne le sont pas dans la même "philosophie" et n'ont pas la même finalité que ne le sont les aglorithmes des services en ligne privés tels que l'achat en ligne, ou la réservation de billets d'avion en ligne, etc.

Ainsi, selon le Etalab : "Par rapport aux algorithmes mis en oeuvre par le secteur privé, les algorithmes publics ont des caractéristiques particulières :
  • Ils sont censés opérer au service de l’intérêt général,
  • Ils servent souvent à exécuter le droit, à (faire) appliquer la loi,
  • Ils sont bien souvent incontournables, c’est à dire qu’il n’existe pas d’alternatives pour les usagers."[4].
Les algorithmes des administrations publics sont : "des formes de l’action publique et sont à ce titre soumis à la même forme d’exigence de redevabilité." [4].

Les administrations doivent rendre des comptes et motiver leur décision aux administrés et à la société. C'est pourquoi le Etalab précise ce qu'il est nécessaire que les administrations mettent en oeuvre concernant la redevabilté :
  • "signaler, en indiquant quand un algorithme est utilisé,
  • décrire, en précisant le fonctionnement général de l’algorithme,
  • justifier, en expliquant les objectifs poursuivis et les raisons du recours à cet algorithme,
  • expliquer ses effets, en expliquant un résultat individuel mais aussi en précisant les impacts généraux et particuliers,
  • rendre accessible, en publiant le code source et la documentation associée,
  • permettre la contestation, en indiquant les voies de recours possibles."[4]
En d'autres termes, les administrations doivent intégrer dans leurs procédures en ligne leurs obligations légales, comme elles le faisaient pour les procédures classiques [4].

Les décisions prises par des algorithmes ont les mêmes effets que les décisions classiques pour introduire une demande d'aide sociale ou faire valoir un droit, etc. Il est donc nécessaire que cette décision automatisée soit une décision juste [4].

Ainsi, pour le Etalab, il y a : "quatre critères à respecter pour qu’une décision prise à l’aide d’un algorithme soit considérée comme juste :
  • la transparence: il faut que la procédure soit décrite,
  • l’intelligibilité: il faut que la procédure soit compréhensible par les intéressés,
  • la loyauté: il faut que la procédure décrite soit effectivement utilisée de manière complète et fidèle,
  • l’égalité de traitement: il faut qu’aucun individu n’ait fait l’objet d’un traitement plus favorable (ou défavorable) que les autres individus concernés." [4].
Ainsi, comme pour les décisions classiques, les décisions automatisées pourront être tout à fait considérées comme juste, même si elles ne sont pas favorable, du fait qu'elles soient justifiées dans leurs formes et sur le fond (critères d’éligibilité, conditions d’accès, etc.).

Mais outre l'exécution de procédures en ligne pour faire valoir ses droits ou effectuer des démarches administratives, les algorithmes publics entrent en action aussi dans la prédiction et la détermination des besoins des citoyens.

Le passage du "mode guichet" au "mode en ligne" et l'usage prédictif des algorithmes remettent en question la notion de droit et d'ayant-droit pour la remplacer par celle d'assujetti, car ils ne réagissent pas en fonction de la situation actuelle de la situation de l'ayant-droit, en effet : "les prédictions attendues des algorithmes imposent aux individus ce que l’arbitraire informatique retient de leurs comportements passés." [2].

Analyser les situations passées, c'est permettre de mettre en évidence des comportement possibles futurs. Le secteur privé utilise déjà les algorithmes prédictifs pour établir les prix de ses prestations (assurances, etc.). Dans les administrations, les algorithmes sont tournés vers l’amélioration des fonctionnements [2].

Néanmoins, le prédiction est un marché qui intéresse grandement les entreprises du Big Data et autres, c'est ainsi qu'un marché des comportements futurs se développe, et avec lui un capitalisme de la surveillance : "Cette nouvelle forme de capitalisme traduit l’expérience humaine en données comportementales afin de produire des prédictions qui sont ensuite revendues sur le marché des comportements futurs, y compris pour les services sous autorité régalienne, comme la police et la justice." [2].

Des expériences de prédiction dans des secteurs politiquement et socialement sensibles sont déjà mis en oeuvre à Bristol : "Récemment, une enquête de The Gardian révélait que 140 des 408 collectivités locales du Royaume-Uni ont développé des systèmes de prédiction à destination des travailleurs sociaux. Et de citer le cas de Bristol.". [2]

Les données des différentes administrations (emploi, santé, etc.) et services de polices sont regroupées, ainsi : "L’ordinateur IBM ronronne jour et nuit pendant qu’un algorithme parcourt les données relatives à la vie de 170 000 habitants de Bristol. Ces informations sont communiquées par la police, le NHS le [service de santé public], le ministère de l’Emploi et des Retraites et les autorités locales. Emploi, problèmes d’alcool, de drogue, de santé mentale, infractions, incivilités, absences scolaires, grossesses précoces et violence domestique, tout y est." [2].

Les prédictions des services publics servent à guider les agents de terrain et cibler les aides publiques, néanmoins les algorithmes servent aussi à dénicher les éventuels fraudeurs, et ils peuvent avoir des conséquences sur des réalités sociales qui peuvent aller jusqu'à l'arrêt automatisé du versement d'aides sociales, et : "les algorithmes sont loin d’être fiables et peuvent exprimer les préjugés de leur concepteur." [2].

D'autres exemples de "ratés" de la part des algorithmes ont été mis en évidence comme le domaine de la santé, ainsi : "Une étude publiée dans Science en octobre 2019 conclut que l’algorithme en usage dans les hôpitaux américains pour attribuer des prestations de santé est moins susceptible de faire bénéficier les Noirs que les Blancs des programmes destinés à améliorer les soins de patients présentant des besoins médicaux complexes." [2].

E-citoyen

Etre citoyen dans un espace urbain en pleine révolution cybernétique ce sera s'intégrer dans une nouvelle forme de gouvernance moderne et une nouvelle forme de régulation sociale. Ainsi, dans nos villes intéractives et autres smart-cities, nous nous retrouverons dans de nouvelles formes de liens sociaux et politiques.
Nous seront en tant que citoyens inscrits dans une organisation des réseaux, réseaux d'objets connectés, réseaux de flux d'information, dans lesquels nous auront de nouvelles formes d'identité et d'authentification, en d'autres termes une nouvelle forme de socialité.[5].

L'e-citoyen dans notre futur e-ville sera confronté à l'interaction entre les institutions publiques et les acteurs privés au travers des systèmes d'authentification, de surveillance de santé, de services biométriques, etc.

Cette évolution pose la question de la gouvernance de la Ville, numérique ou smart. La Ville où se pose la question de sa redéfinition, ainsi l'Etat définit par Max Weber dans sa forme idéale-typique serait : "« (…) une communauté humaine qui, dans les limites d’un territoire déterminé-la notion de territoire étant l’une de ses caractéristiques- revendique avec succès pour son propre compte le monopole de la violence physique légitime. »" [5].

Dans cette nouvelle forme d'espace territorial se posera la question de comment la cybernétique va influer sur les acteurs sociaux et plus particulièrement ceux en charge d'appliquer la violence légitime, c'est-à-dire la police, les administrations, l'armés, la justice, etc. En d'autres termes qui sanctionnera qui : les sociétés de sécurité, les algorithmes des caméras de surveillance.

Cette nouvelle forme d'organisation de la ville et des rapports sociaux qui s'y développent et dans laquelle nous serons une collection d'information, de traces, sera fondée sur les datas. Cela change le paradigme de la vie citadine : "Le paradigme des traces, compris comme l’association du signe (signum) et de la donnée ( data) autorise une nouvelle conception des politiques de la ville et des territoires" [5].


iThink Cybersurveillance - Gabriel Péries - Institut Mines-Télécom Business School


L'e-citoyen devient donc des e-traces, ce qui constitue une nouvelle forme de territorialité sociale, politique, économique, personnel. Cette nouvelle forme d'organisation nécessite des opérateurs de datas pour fonctionner dans un système basé sur le Big Data, et dans lequel les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) organisent nos circuits de communication et de contrôle.

Une nouvelle forme de légitimité s'impose dans ces villes intelligentes, c'est la légitimité technique. La technologie étant le support de cette nouvelle organisation urbaine, la technique y acquière donc une nouvelle légitimité.

Ce nouvel espace urbain sera basé sur la vidéosurveillance, et selon Bruno Villalba : "c’est désormais à la vidéosurveillance, dans certains espaces sociaux, d’instaurer une nouvelle technique de décision. L’assimilation routinière de cet outil à une forme légitime de décision pose problème. Incontestablement, le développement de ces outils de contrôle participe à la reconstruction d’un espace politique en pleine mutation." [5].

La gestion cybernétique de notre citoyenneté urbaine pose le problème politique des choix qui devront être fait sur la question des outils techniques qui seront déployés dans nos villes, et plus particulièrement de l'automatisation de ces outils et des procédures de contrôle pour lesquels ils sont mis en oeuvre, car : "Cette surveillance ignore le hors-champ, délimite tout le champ du réel à sa seule vision. Intrusive et silencieuse, elle s’informe de nos comportements, sans nous informer en retour du caractère anormal de nos actions, comme pourrait le faire un agent de police. Sous le regard implacable de ces dispositifs, la norme ne se dit pas, elle a été incorporée dans l’algorithme lui-même que la loi n’a pas défini. C’est donc au prix d’une double réduction, prendre ce qui est filmé pour le tout du réel, et se fonder sur des flux sémiotisés, que la vidéo protection croit pouvoir tenir la réalité" [5].



[1]  Cours des Comptes, "RELATIONS AUX USAGERS ET MODERNISATION DE L’ÉTAT : Vers une généralisation des services publics numériques", Janvier 2016, https://www.ccomptes.fr/sites/default/files/EzPublish/20160204-rapport-relations-usagers-modernisation-Etat.pdf
[2] Philippe Warin, "Citoyens taisez-vous : les algorithmes parlent à votre place", The Conversation Trust, 16/12/2019, https://theconversation.com/citoyens-taisez-vous-les-algorithmes-parlent-a-votre-place-128649
[3] Europa.eu, "L’UE ET LE MARCHÉ UNIQUE NUMÉRIQUE", Union Européenne, 8/08/2017,
https://op.europa.eu/fr/publication-detail/-/publication/8084b7f3-6777-11e7-b2f2-01aa75ed71a1
[4] Etalab, Direction interministérielle du numérique de l’État, "Guide des algorithmes publics", https://etalab.github.io/algorithmes-publics/guide.html
[5] Gabriel Périès, "L’espace urbain objet de la révolution cybernétique Quel espace pour l’e-citoyen ?", El Correo de la Diaspora Argentine,  http://www.elcorreo.eu.org/L-espace-urbain-objet-de-la-revolution-cybernetiqueQuel-espace-pour-l-e-citoyen





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